Au mois de septembre dernier, je me suis prêté à un exercice un peu particulier dont le résultat n’a été diffusé que cette semaine. S’ajoutent donc aux « J’ai testé »…
Passer à la radio.
Il y a quelques mois, je reçois une invitation de l’animatrice de « l’APF vous accueille » sur RCF Nièvre. Cette émission de radio côtoie de près le handicap en présentant régulièrement des associations, des témoignages… et maintenant des blogs ! C’est donc naturellement (mais non sans appréhension) que j’ai accepté de me soumettre à cet exercice.
Le 1er septembre, 10h30, me voici à l’enregistrement par le biais du téléphone. Rien n’a été préparé et de ce fait, je réponds aux questions selon l’humeur et l’idée du moment. Quelques jours plus tard je reçois le fichier son et, évidemment, je m’y trouve tous les défauts du monde. D’ailleurs, trois mois plus tard, je suis incapable de me réécouter. Mais peu importe, le résultat est là. Cependant il faut faire attention et ne pas oublier que cette interaction a eu lieu il y a un certain temps maintenant : depuis il y a eu grand nombre de changements !
La première partie parle davantage de « mon cas » : accident, handicap, organisation de vie. Pour ceux qui connaissent déjà tout ça, vous pouvez démarrer l’écoute à 12m20s : j’y reparle du but d’1P2Vs et des gros articles de cet été (covoiturage et animation) mais avec pas mal d’infos bonus ! Bonne écoute (soyez indulgent) !
Vous êtes avec nous aujourd’hui pour un site…
C’est un blog que j’ai créé pour pouvoir écrire sur le handicap mais de façon humoristique. C’est pour parler du quotidien, des choses de tous les jours et pour montrer aussi que l’on peut faire beaucoup malgré le handicap.
Quel type de handicap ? Comment ça vous est arrivé ?
Il y a 2 ans j’ai eu un accident de voiture, j’ai glissé sur une plaque de verglas et j’ai une cervicale qui s’est déplacée. Maintenant je suis tétraplégique incomplète : je ne marche pas, mes jambes ne fonctionnent pas totalement et j’ai des soucis aux mains aussi. Mais je m’en sors plutôt bien par rapport à d’autres.
Donc pour vous dans le fond ça aurait pu être pire et vous prenez ce que vous avez avec philosophie ?
C’est vrai qu’il aurait pu être pire, il aurait pu aussi ne pas se passer alors ma foi, on n’accepte jamais vraiment ce qu’il se passe mais ça ne sert à rien de rester bloqué : il faut avancer parce que ce n’est pas comme ça (en restant bloqué) qu’on vit.
C’est assez rare d’avoir quelqu’un qui, seulement après 2 ans arrive à faire de l’humour sur son handicap !
Ce n’est pas si rare que ça en réalité. J’ai passé beaucoup de temps en centre de rééducation et on y rencontre beaucoup de gens. On est tous un peu comme ça , à faire de l’humour sur nous même parce que c’est une façon de rendre les choses un peu moins sérieuses, un peu moins graves.
C’est une façon d’extérioriser cette douleur ?
Oui, et c’est une façon aussi de montrer à ceux qui nous entourent qu’on est pas malheureux. Évidemment, on voudrait des choses qu’on ne peut plus avoir mais ce n’est pas pour ça qu’on est malheureux.
Comment sur le coup vous avez réagi ? Et votre entourage ?
Sur le coup c’est compliqué car quand on se réveille à l’hôpital, on ne se rend pas trop compte de ce qu’il se passe. Sur le coup j’étais persuadée que ce n’était que temporaire, éphémère : je me voyais déjà faire la rentrée scolaire quelques mois plus tard. On se rend compte petit à petit, au fil du temps.
Pour ce qui est de l’entourage, le problème c’est que les premières informations qu’ils ont viennent des médecins qui essayent de ne pas être trop optimistes (afin d’éviter les faux-espoirs) donc il y a des choses assez difficiles qui passent et c’est très compliqué pour l’entourage […] d’accepter ce qu’il se passe.
Qu’est ce que vous faisiez avant ? C’était dans quel domaine ?
J’étais en contrat de professionnalisation c’est à dire que j’étais trois jours à l’école et deux jours en entreprise. Ce toutes les semaines.
J’étais en communication visuelle.
Votre âge ? Vous êtes jeunes et vous avez décidé de continuer à avancer.
23.
Disons que j’ai toujours été très optimiste comme personne, c’est l’instinct de survie qui est particulièrement développé mais c’est surtout que ce n’est pas en s’apitoyant sur soi-même qu’on avance et si on avance pas, on ne vit pas. C’est vrai que c’est (parfois) difficile au quotidien, c’est vrai qu’il y a des choses qui nous manquent mais on peut faire quand même une quantité de choses (c’est un mot que j’ai décidément beaucoup affectionné ce jour là !) tout à fait acceptable.
Comment vous gérez votre vie ?
Je suis INdépendante au quotidien […] donc c’est moi qui gère en fonction de ce que j’ai dans la journée, de l’emploi du temps que je me donne.
Vous avez des auxiliaires de vie ? Par choix ?
Pas tellement. Les seules aides que j’ai viennent de mes amis ou de ma famille. C’est un choix personnel.
Comment vous arrivez à tout gérer dans la journée ?
Vous savez pour le moment, ça ne fait pas longtemps que je suis sortie de centre de rééducation […] donc je n’ai pas encore une vie construite avec un travail et un quotidien. Ce n’est pas encore très compliqué.
Vous avez encore de la kiné ? Ça occupe bien quand même ?
Trois fois par semaine, je me suis arrangée pour l’avoir le matin ce qui fait qu’après, j’ai toute la journée devant moi.
Quel est l’avenir de Daphnée ?
Pour le moment c’est un peu la grande question : « Qu’est-ce que je vais faire exactement ? » Exactement je n’en sais rien mais j’ai beaucoup d’envies : j’ai envie d’écrire, envie de communiquer sur le handicap parce que je me rend compte que ce n’est pas assez fait – d’où le blog d’ailleurs – envie de voyager, envie de faire des choses en oubliant les barrières que peuvent m’apporter le fauteuil.
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Pause musicale
Claps your hands de Parov Stelar, une musique qui me met toujours de bonne humeur. C’est de l’électro-swing, qui est un style que j’affectionne particulièrement : ça a des notes à la fois modernes et vintages, je trouve que ça correspond bien aussi à ma vie actuelle.
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1 Parenthèse 2 Vies : Deuil d’une vie, démarrage d’une autre mais les deux sont liés…
L’histoire de la parenthèse, c’est qu’on ne sait jamais quand est-ce que ça va finir, où est-ce qu’on la délimite. Est-ce qu’on la délimite à la rééducation et à tout ce qui fait que je suis devenue ce que je suis en tant qu’handicapée […], est-ce qu’on l’arrête à un moment « si je remarche »… Voilà, c’est une parenthèse, on ne sait pas quand on la referme mais elle est là.
Vous avez créé ce site dans quel but exactement ?
Et bien je me suis rendue compte que les gens en général, même moi avant, quand on croise quelqu’un en fauteuil, on se dit vaguement « ce doit être difficile » et on a un peu pitié parce que c’est ancré dans la société. Mais si on y réfléchi, on a aucune idée de ce que c’est en fait. Donc mon but en écrivant c’est d’expliquer ce que c’est notre quotidien : des choses toutes bêtes qu’eux font, ce que ça donne pour nous. C’est souvent plus compliqué, plus long, mais c’est pas forcément complexe : ça peut être une habitude à prendre et ça peut devenir anodin même si c’est plus long.
Vous ne vous appesantissez pas sur vous…
Je veux montrer aux gens qu’il n’y a pas que ça (des difficultés) : ils savent très bien qu’en fauteuil ce n’est pas facile et ils ont déjà cette dimension un peu malheureuse, ils n’ont pas besoin d’avoir des preuves en plus . Moi ce que je veux leur montrer c’est que réellement il y a des côtés beaucoup plus positifs que ça. C’est pas la fin du monde d’être en fauteuil, même si c’est affreux, qu’on est bien mieux debout, il n’empêche que ce n’est quand même pas la fin d’une vie.
Oui, il y a une vie après le fauteuil, il suffit de s’apprivoiser.
Et puis c’est vrai que je cherche aussi à montrer, surtout depuis quelques temps […] qu’il y a des choses qu’on peut s’imaginer impossibles en étant en fauteuil et en réalité qui ne le sont pas du tout. Ce n’est pas parce qu’on est handicapé qu’on est capable de rien.
Vous pouvez nous donner un exemple ?
J’ai fait du covoiturage, c’est comme ça que j’ai voyagé cet été. Comme quoi on est pas obligés de rester enfermés.
(Pour la suite, je réexplique ce que j’ai écris dans l’article : Fauteuil roulant et covoiturage)
Quelle est la question la plus saugrenue qu’on vous ait posé ?
Il y a beaucoup de questions mais les plus saugrenues que j’ai eu viennent des enfants puisque cet été j’ai travaillé en tant qu’animatrice […], les adultes sont plus « prudents » en général.
(Nous avons ensuite enchaîné sur ce que j’ai écrit ici : Être une animatrice en fauteuil et là : Enfants et animatrice en fauteuil, bêtisier
BONUS : j’explique ici comment je me suis retrouvée dans l’aventure « animation » , je donne des précisions sur le lieu de la colo (accessibilité) et sur l’arrivée des enfants (à partir de 21m15s)
Qu’est ce que vous imaginez pour la suite ?
Je ne pense pas reprendre mes études mais travailler oui. Travailler et dans ma branche, et pour d’autres choses. Mais je n’ai pas tellement envie de me poser pour des années, pour le moment j’ai envie d’aller un peu à droite à gauche, de tester des choses et voir ce que ça donne.