Handicap et paradoxes, lorsque les normes occultent l'individualité.

Handicap et paradoxes, lorsque les normes occultent l’individualité.

 

 

Paradoxe (n.m.) : Être, chose ou fait qui paraissent défier la logique parce qu’ils présentent des aspects contradictoires.

Occulter (v.) : Cacher ou rendre peu visible.

Dictionnaires français Larousse et Petit Robert.

 

 

Cela fait des semaines qu’un sujet sur l’individualité me titillait le bout des doigts. Mais manque de temps, de structure, de développement, l’article ne venait pas. Et puis j’ai participé à une réunion café/thé et blablatage avec quelques Dare Women, femmes audacieuses de l’association dont je te parlais juste ICI. Ce fut le déclic, les infos qu’il me manquait, la sauce bolognaise sur les spaghettis, la crème chantilly sur le bol de fraises (merci à elles !)

 

 

Handicap et paradoxes, lorsque les normes occultent l'individualité.

 

 

Tout partait d’une réflexion anodine…

 

De plus en plus active sur Instagram, je tombe un jour sur une publication qui mettait en avant l’absurdité de certaines annonces de logement. Celles qui promettent une adaptation nickel pour une personne en fauteuil roulant, mais qui présente pourtant une baignoire comme seul moyen de se laver. Me reconnaissant dans ce genre d’imprévus subis au cours de mes nombreux voyages, je partage la remarque.

 

Quelques heures plus tard, je reçois un message d’une Optimiste qui ne comprends pas la raison de ces réactions puisqu’elle, une baignoire ne la dérange pas pour se laver, et ce alors qu’elle a un handicap.

 

Et voilà. Le problème des normes et de leur pertinence est remis au goût du jour : même entre les handi il y a incompréhension.

 

 

Vocabulaire approximatif.

 

Ainsi donc, ce qui convient à un handicap, ne convient pas à un autre et inversement. Les bandes de guidage au sol sont indispensables aux personnes malvoyantes et aveugles, mais sont un calvaire pour celles en fauteuil roulant.

 

 

Handicap et paradoxes, lorsque les normes occultent l'individualité.

 

 

Dans le milieu de l’entreprise, même combat. Les adaptations diffèrent d’un handicap à un autre. Si on aménage tel poste à tel handi, il vaut mieux que ce-dit handi reste en place assez longtemps pour que ce soit rentable non ? Comment espérer faire tomber les aprioris sur le handicap lorsque ce mot général englobe en réalité tout un tas de situations distinctes les unes des autres ?

 

Côté recrutement, il y aura toujours ce sentiment de culpabilité qui freinera : d’accord il faut embaucher aussi en pensant inclusion. Mais si la personne n’est finalement pas compétente et que son renvoi est nécessaire ? Non seulement l’aménagement du poste aura coûté cher pour peut-être ne pas être utile au salarié suivant, mais en plus la RH craindra d’être accusée de discrimination. Certains se demandent forcément si ça vaut le coup de prendre le risque.

 

 

L’individualité mise à mal en sortant de chez soi.

 

Sans aller jusqu’à parler d’emploi, la rue à elle seule est le théâtre de bien des paradoxes concernant le handicap. Moi qui suis en fauteuil, j’ai tendance à tout faire pour qu’on oublie que je le suis, pour passer inaperçue. J’avais déjà évoqué ce bonheur lorsque j’étais allée à New York. D’avoir eu l’impression de faire partie du paysage au même titre que n’importe quel passant, ou touriste du moins. Parce qu’en France, le fauteuil stigmatise, attire la pitié, la maladresse voire l’irrespect et l’infantilisation. Ici nous sommes moins habitués aux traumatismes, ou nous n’y faisons pas face.

 

 

Handicap et paradoxes, lorsque les normes occultent l'individualité.
Gif extrait d’I love Lucy

 

 

Et puis à l’inverse, mon amie qui a la sclérose en plaques sans que ça ne se perçoive vraiment, est parfois obligée de se battre pour mettre en avant son handicap. Pour une place de parking ou une place dans le bus, pour plus d’indulgence et de bienveillance.

 

Même au sein de chaque « famille » de handicap, il y a des divergences de points de vue, d’impressions, de volontés. Prenons deux personnes qui marchent avec une canne blanche : l’une aura besoin que les autres fassent attention pour ne pas avoir l’impression d’être discriminée. L’autre préfèrera que l’on arrête de faire un remake de Moïse chaque fois qu’elle se balade dans la rue.

 

Certes, le manque de connaissances est à l’origine de nombreux comportements déplacés ou maladroits. Une personne avec une canne blanche n’est pas obligatoirement aveugle, une en fauteuil n’est pas obligatoirement paralysée à 100%, un muet n’est pas sourd même si l’inverse peut souvent aller de paire… BREF.

 

 

Oui les préjugés ont la vie dure mais…

 

Mais n’y a-t-il pas aussi et surtout, un oubli quant à l’individualité de chacun ? Nos handicaps nous rangent dans des cases, occultant le parcours et la personnalité de chacun, les « détails » qui font qu’au-delà d’être en fauteuil, en déambulateur, avec une maladie, une malformation… nous sommes avant tout « quelqu’un.»

 

 

 

 

D’accord mais alors au niveau des normes, qu’est-ce qu’on fait ? Au niveau des attitudes, laquelle faut-il adopter ? Doit-on définir un classement des handicaps pour définir qui a la priorité sur les places de parking handi trop peu nombreuses ? Pour décider de ce que doit être une salle de bain adaptée ? Faut-il prendre en compte ou ignorer un handi que l’on croise dans la rue ?

 

Beaucoup de questions auxquelles nous voudrions répondre suite à de longues et compliquées réflexions, alors qu’il suffit parfois d’un peu de logique. Tout simplement.

 

 

Percevoir l’individualité de l’autre est instinctif.

 

En fauteuil, la douche dans une baignoire c’est très souvent compliqué. Pas toujours. Mais souvent. Debout, une douche ou une baignoire c’est possible. Car il ne s’agit pas de préférences mais bien de possibilités qu’il faut évoquer. Donc il faut opter pour ce qui peut aller au plus grand nombre. Cessons de ne penser qu’à soi et à son unique confort.

 

Même chose pour la place de parking. Quelqu’un en fauteuil n’a pas le choix, il ne peut pas se garer ailleurs car il a besoin d’espace à côté de la voiture pour sortir le fauteuil. Alors d’accord, certains sont plus à l’aise de se garer près pour des raisons de cœur, de poumons, de douleurs… Mais soyons raisonnables, quand le parking est petit, ça ne changera pas grand-chose de s’y garer au milieu si une place de largeur standard leur suffit.

 

 

« Élémentaire mon cher Watson ! »

 

 

Pour finir, lorsque l’on croise une femme enceinte dans la rue, nous n’accourrons pas à sa rencontre pour lui proposer de l’aide (ou lui demander « ce qu’il lui ait arrivé » n’est-ce pas…). Nous ne lui offrirons un coup de main que si on voit qu’elle en a besoin, qu’elle peine à faire quelque chose ou aller quelque part. ET BIEN UN HANDI C’EST PAREIL. Considérer chaque Être humain qui croise notre route avec ses particularités, ses singularités propres, ça n’est pas à réfléchir : c’est instinctif.

 

 

Moralité ?

 

Donnons des vacances à notre cerveau, faisons un peu plus confiance à notre instinct… et à notre esprit logique. Parce que prendre en compte l’individualité de l’autre ça n’est pas (si) compliqué ! 😉

 

 

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1 commentaire sur “Handicap et paradoxes, lorsque les normes occultent l’individualité.

  1. tu as mis du temps à écrire ton article – à savoir comment le tourner. Hé bien ce n’est pas plus facile ni rapide lorsqu’un « valide » croise un « handi » de savoir comment réagir. Tu parle de l’instinct?(<>) Pas aussi simple que cela . Déjà d’un valide à un autre, l’instinct immédiat de savoir comment il est et comment il faut le prendre ce n’est pas évident. Alors par rapport à un handi ça l’est encore moins. Déjà il faut le voir. Tu parles justement de la SEP: tu ne peux pas le voir d’instinct. Donc il faut comprendre sans savoir ni connaitre. Pas évident. Quelque chose de (très!) visible: un fauteuil. ça on connait. Ben non justement pas tant que ça. Pas évident de savoir à quel moment il a besoin d’un coup de main et quand il ne faut surtout pas lui proposer notre aide pour ne pas le faire justement se ressentir dépendant. Pi en plus si tu veux donner un coup de main, lui il ne sait pas que tu « sais » comment faire. Pas le temps de lui expliquer pourquoi et comment tu sais comment aider (formation – boulot – cas familial)
    Donc oui c’est peut-être de l’instinct mais c’est aussi et surtout de la compréhension et des concessions à faire et ce, dans les deux sens. Les concessions entre humains: l’histoire de la vie que beaucoup oublient actuellement….
    L’instinct peut-être…..le cœur surement.

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